J'ai présenté un travail plastique en 2006 à la galerie Weiller dans le cadre d'une exposition personnelle
"Un idiot en liberté"
Texte de la plaquette :

ÊTRE DEUX
Il y a viol.

Et c'est ainsi qu'on se fait deux.
Et même deux de trois façons différentes.
Il ne nous reste plus alors qu'à se faire poète.
Poète pour tenter de persister. Tenter de n'être pas tout à fait deux, je veux dire irrémédiablement deux.
Poète idiot pour tenter d'être un peu moins idiot. Un peu plus idiot donc, je veux dire poétiquement idiot.
Car c'est un idiot qui vous parle.
Un pas tout-à-fait -idiot parce qu'un peu plus idiot que les autres.
Et il vous parle en prophète de l'idiotie.
"Rien n'est idiot", disent-ils.
"Oui, répond le prophète. Il est impossible de faire quelque chose d' idiot puisque rien ne peut être tout à fait singulier.
Et c'est pourquoi je m'efforce de faire quelque chose que les autres, ceux qui n'ont pas fait l'expérience de l'idiotie, trouveraient idiot. Jugeraient idiot.
N'est-ce pas là la meilleure définition d'une oeuvre d'art : la réalisation d'un acte impossible.
Oui, c'est tellement impossible que je réalise cet impossible
C'est tellement idiot que cela ne devient plus du tout idiot. Que cela devient même terriblement possible".
Et le monde ?
Le monde, il est violé par celui-là même qui s'est fait violé.
Violé donc à l'aide des équations poétiques qui ont permis au poète de s'affirmer poète idiot.
Ces équations, ce sont les formes sur lesquelles danse le poète idiot et ce, pour travailler  à exorciser les trois visages qui lui permettent de s'affirmer poète.
Poète qui danse donc et cela à l'aide du oui et du non puisque le oui et le non ne sont jamais que les deux extrémités de la corde du langage, cette corde sur laquelle le poète tente de se maintenir en équilibre.
En existant poétiquement?
Certains ont dit que les poètes ne cherchaient jamais qu'à prononcer le Mot, ce mot qui donne accès à la clarté de l'être.
C'est bien parce qu'ils considéraient possible l'existence d'un mot qui serait comme une clef et qui donc comme une clef, nous permettrait d'ouvrir notre champ de vision. Nous permettrait de voir enfin à travers le mur du visible l'être, autrement dit ce qui se donne à nous comme ce qui ne peut être vu tellement cela est terriblement visible.
Ce mot, notre poète prétend l'avoir enfin trouvé.
Avoir enfin réussi à s'en emparer. Et de façon si certaine ou si violente si vous préférez que cette découverte s'est accomplie dans la mise en place de l'impossible science de l'être, cette science qu'il a dégagé du visible comme étant l'idiotphysique.
Si poétiquement donc que la mission d'être un idiot parmi les autres hommes, autrement dit un prophète de l'idiotie, se révèle pour notre poète être une mission quasi-religieuse, je veux dire nécessitant un véritable sacerdoce.
Et se maintenant ainsi en équilibre, c'est le monde même qu'il maintient en équilibre.
Et c'est pourquoi il invite chaque objet du monde à danser sur la corde infini du langage en aidant chacun de ces objets à s'affirmer oui de lui-même et non de lui-même.

Mais alors pourquoi ce ruban noir ?
C'est pour que la nuit ne se fasse pas.
Pour que parole il puisse y avoir.
Pour rendre donc audible le silence.
Pour rendre donc possible l'impossible vie d'un poète qui se veut idiot.
Parce que poète capable de tordre le cou à tous ceux qui veulent nous faire croire que l'idiotie est une hérésie.
Parce qu' idiot marchant pour tous ceux qui ne peuvent pas marcher, je veux dire les autres idiots, je veux dire ceux qu'on enferme pour crime d'idiotie.
Venez donc rejoindre cet idiot.
C'est pour faire l'expérience de sortir de la langue.
Parce qu'entre la glace du oui et la glace du non, il y a la glace de tous les mots de la langue.
La Glace donc, l'unique glace qu'il nous soit nécessaire de déguster et qui est la Glace du langage, c'est-à-dire la glace qui nous donne accès au miel de l'existence.
C'est donc bien pour parler une autre langue qu'il nous faut rejoindre cet idiot.
Et c'est de l'autre côté du silence.
Tout cela et bien d'autre chose encore, notre idiot l'a mis au point dans une suite de textes qu'il espère pouvoir livrer au grand jour dans un temps assez proche.
Mais faute de pouvoir répondre dans l'immédiat à cette attente, il s'est décidé à réaliser pleinement la pensée de ces textes pour faire que leur puissance s'exerce enfin pleinement sur tout ceux qui voudraient bien se prêter au jeu mortel de l'idiotie.
Autrement dit sur un public fait d' homme capables de remettre en cause la strucure même de leur vision. De remettre en cause l'angle même de leur rapport à l'être.

Un dernier mot donc pour finir.

Ne venez pas vous joindre à nous si vous pensez qu'une oeuvre ne vaut pas le coup d'une prise de risque.
Ne vaut pas la mort d'un homme même si cette mort est poétique.
Réfléchissez donc bien : pensez-vous qu'un poète puisse parler de l'être sans prendre le risque de l'être.
Si votre réponse est non, oubliez ce petit livre.
Mais si c'est oui, venez au contraire vous joindre à nous pour qu'ensemble nous traversions le miroir du visible et puissions ainsi entièrement nous adonner aux fruits de l'idiotie.
Photos de l'exposition
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